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6 liens étonnants entre coronavirus et environnement

Bonjour, c’est Alexandre. Comme vous pouvez vous en doutez, j’ai passé au moins autant de temps à penser au coronavirus qu’au développement durable récemment. Et après plusieurs semaines de réflexion et de lecture, j’ai fini par découvrir les liens entre les deux. Alors aujourd’hui, on va parler de la souris à pattes blanches, d’arbres qui parlent, d’opossums, d’humains et on va passer en revue 6 connections surprenantes entre le coronavirus, l’environnement et le changement climatique. Allez, dessinons !

Quand la crise du coronavirus a commencé, j’ai découvert, comme beaucoup d’entre vous, ces courbes. En gros, notre but était de conserver le nombre de personnes infectées sous la barre représentant la capacité de notre système de santé. Et puis certains ont commencé à dire “eh, il faudrait aussi aplatir cette courbe”, en parlant du changement climatique. J’ai trouvé ça très astucieux. Mais ce qui m’a intéressé encore plus, c’est que même si ces deux courbes correspondent au même nombre de personnes infectées, dans le bon scénario, moins de gens meurent. Et bien c’est exactement pareil avec le développement durable : même si on utilise la même quantité de ressources naturelles, dans le scénario durable, nous les utilisons à un rythme moins élevé si bien que cela crée moins de victimes (comme les animaux, les écosystèmes, les individus, etc.) En d’autres termes, il s’agit de répondre aux besoins humains tout en restant dans les limites écologiques.

Regardons notre empreinte écologique par exemple. Voici la courbe: il s’agit de vivre en n’utilisant qu’une seule planète alors que nous en utilisons 1,7 actuellement. Même si nous utilisons la même quantité de ressources naturelles, dans le scénario souhaité nous vivons de nos intérêts, dans l’autre, nous vivons à crédit en puisant dans notre capital naturel. Cette notion d’empreinte est d’ailleurs intéressante car c’est précisément notre empiètement constant sur la nature qui augmente les risques de pandémies. Dans cette article du site Internet Vox, Sonia Shah, auteur du livre intitulé Pandemic publié en 2017, explique que “quand on coupe des forêts, les chauve-souris ne disparaissent pas. Elles vont se nicher dans nos jardins et dans nos fermes ce qui augmente les chances d’entrer en contact avec leurs excrétions. Dans le cas d’Ebola, le premier cas répertorié était celui d’un enfant de deux ans en Afrique de l’ouest qui jouait sous un arbre où vivaient des chauve-souris.” C’est également pourquoi il y a eu des épidémies de maladies transmises par les tiques, comme la maladie de Lyme, dans le nord-est des Etats-Unis: quand les forêts étaient intactes, les opossums et les tamias contrôlaient la population de tiques. 50 ans plus tard, il y a moins de forêts, moins d’opossums et de tamias, et plus de souris à pattes blanches et de chevreuils. Mais les souris détruisent seulement une cinquantaine de tiques par semaine alors qu’un opossum en détruit des centaines juste en faisant sa toilette. Nous vivons dans un monde complexe et nos actions ont des conséquences. Ma vidéo sur l’histoire des chats de Bornéo en est un autre exemple.

Comme on l’a dit au début, aplatir la courbe signifie également conserver la concentration de CO2 sous la barre des 350 ppm. Cela ne signifie pas qu’on ne doit pas émettre de CO2. Cela signifie que lorsque nous produisons du CO2 à un rythme auquel la nature peut le digérer, les répercutions sur le climat et les personnes sont moindres. Avec le coronavirus provenant probablement d’un marché d’animaux vivants en Chine, il est tentant d’aborder le sujet de notre consommation de viande. Nous savons que la quantité de viande que nous mangeons joue un rôle important dans le réchauffement climatique: 25% des gaz à effet de serre sont attribués à l’agriculture et environ 15% sont attribués à la production de viande et au bétail (la même quantité que les émissions attribuées à tous les transports soit dit en passant). Bien souvent, les animaux sont entassés pour accroitre les profits. Eh bien, d’après Sonia Shah à nouveau, deux des principales menaces de nouvelle pandémie (les souches très résistantes de pathogènes bactériens et les souches virulentes de grippe aviaire) sont toutes les deux stimulées par la surpopulation dans les fermes industrielles. Moi j’appelle ça une excellente opportunité de régler deux problèmes majeurs d’un seul coup, qu’en pensez-vous ? Cela me permet également de boucler la boucle sur la déforestation abordée plus tôt puisque l’élevage de bétail est la principale cause de la destruction de la forêt amazonienne : au rythme actuel, 25% de cette forêt n’aura plus d’arbre en 2030 et elle cessera d’être un puit de carbone en 2035.

Ce qui nous amène au point suivant : comme la capacité du système de santé peut diminuer lorsque le personnel médical tombe malade pendant une pandémie, le changement climatique et la destruction de la nature diminue la capacité de la terre à nous soutenir. C’est un cercle vicieux. Nous savons déjà que lorsque les glaciers fondent, la surface blanche plus petite reflète moins les rayons du soleil et augmente le réchauffement de la planète. Dans une étude récente publiée dans le journal “science”, Tim Brodribb a passé en revue les 10 dernières années de mortalité des arbres et en a conclu que “la plupart des arbres vivants aujourd’hui ne survivront pas le climat attendu dans 40 ans.” Il dit même qu’avec un micro on peut entendre leur dernier souffle. Cela pourrait signifier moins de capacité à absorber nos émissions de carbone, plus d’animaux sauvages dans nos jardins et plus de risques de pandémies. Encore une bonne raison pour agir immédiatement sur le climat et la destruction systématique de la nature. Comme je l’ai expliqué dans une vidéo précédente en utilisant la métaphore d’un entonnoir, plus on attend, moins on a de marge de manoeuvre.

Comme le biologiste Thomas Lovejoy l’a fait remarqué dans un article récent du quotidien britannique Guardian “ce n’est pas la nature qui se venge, nous nous sommes infligé cela à nous-même.” La nature nous envoie un message et la crise du coronavirus a créé une formidable opportunité de changer nos pratiques et de trouver des moyens de mieux fonctionner en partenariat avec la nature. Paradoxalement, cette pandémie a également généré une réduction notable d’émissions de gaz à effet de serre à travers le monde (une diminution estimée de 5.5% de nos émissions de CO2 serait le plus important changement jamais enregistré d’une année sur l’autre) et une amélioration de la qualité de l’air dans plusieurs grandes villes. Alors saurons-nous résister à la tentation de nous jeter à nouveau sur nos systèmes défectueux dès que la pandémie s’estompera et saurons-nous créer à leur place les systèmes que le futur nous réclame ? Merci de me dire ce que vous en pensez dans les commentaires ci-dessous.

2 Commentaires

  • WATHELET dit :

    Merci Alexandre de ces explications et de cette analyse parallèle du Coronavirus et développement durable.
    Instructifs, ces rapprochements entre l intervention humaine sur la nature (déforestation…)et les maladies transmises par les animaux sauvages (chauve-souris….).
    Bien cordialement

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